“Un jour, Hikosaburô porte secours à une Indienne, Running Deer, poursuivie par des chasseurs de prime. Ils sont sauvés in extremis par un groupe de guerriers Oglagla conduits par Crazy Horse. Le chef indien, fasciné par la technique de combat des deux samouraïs, les invite à rejoindre son campement pour enseigner le ju-jitsu à ses hommes. Une profonde amitié va alors naître entre eux.”
“Devenus Sky Hawk et Winds Wolf, les deux samouraïs vont lutter aux côtés des Indiens contre les hommes blancs venus à la conquête de l’Ouest. La bataille pour sauver leur terre sacrée des Black Hills s’annonce terrible, mais ces valeureux guerriers sont bien décidés à lutter jusqu’au bout.”
“Avec SKY HAWK, Jirô Taniguchi nous livre un western fascinant où bushidô japonais et code d’honneur indien se retrouvent autour des mêmes valeurs. Les décors du far-west américain et le style épuré de l’auteur servent à merveille l’histoire d’une amitié improbable.” [Texte de présentation du rabat de couverture ainsi que du site de l'éditeur]
Sky Hawk (天の鷹 / Ten no taka / lit. “Faucon Céleste”) a été publié au Japon par Futabasha en 2002 et en France par Casterman (collection Sakka) en 2009. Taniguchi démontre une fois de plus sa polyvalence par le fait qu'il est à l'aise avec une grande diversité de genres. Il poursuit son rapprochement avec la BD franco-belge en s'attaquant cette fois au western, un genre typiquement occidental. Dans la préface de l'ouvrage, Jean “Moebius” Giraud se targue d'ailleurs que le western survit maintenant plus dans la BD franco-belge que dans le cinéma Hollywoodien. Et Taniguchi, dans la postface, avoue encore une fois avoir grandement été influencé et stimulé par cette BD européenne, particulièrement—dans le cas de Sky Hawk—par les “séries de western telles que Mac Coy [Gourmelen & Palacios], Blueberry [Charlier & Giraud], Comanche [Herman & Greg], Jonathan Cartland [Harlé & Blanc-Dumont]”. Il a bien sûr également été inspiré par le western hollywoodien (des films comme Little Big Man, Jeremiah Johnson, Un homme nommé cheval, Danse avec les Loups ou Le Derniers des Mohicans). Il précise qu'il voulait faire du western depuis longtemps mais qu'il cherchait une façon d'introduire le genre d'une manière qui serait appréciée par le public japonais. C'est alors qu'il eut l'idée de mettre en scène des personnages Japonais.
Sky Hawk semble bien loin de l'humanisme et des déambulations introspectives du Journal de mon père ou Quartier Lointain. On y retrouve pourtant une des thématiques chères à Taniguchi: les vastes étendues de nature sauvage. En effet, Sky Hawk allie avec dextérité l'action et le naturalisme de Blanco à la violence et au récit historique de Kaze no Sho. Sur une toile de fond historique rigoureusement recherchée, Taniguchi superpose l'histoire de deux ronins exilés dans l'ouest américain. Si ces deux personnages sont eux fictifs, la présence de Japonais en Amérique à cette époque est un fait établi (il nous le précise dans la postface: “j'ai appris qu'en 1869 une quarantaine de Japonais du clan Aizu, ayant perdu la guerre de Boshin, avaient emprunté le bateau à vapeur China, partant de Yokohama pour se rendre à San Francisco”). Pour ancré l'authenticité du récit il le parsème de faits et de personnages historiques, le faisant culminer avec la bataille de Little Big Horn où Custer sera défait et tué.
Sky Hawk est une bonne occasion pour Taniguchi de dessiner ces grands espaces naturels et sauvages qu'il aime tant, mais aussi de tracer un parallèle entre les cultures nippone et amérindienne qui, toutes deux basées sur des croyances animistes, vouent un grand respect à la nature. La comparaison pourrait bien même être poussée au niveau politique: les deux samurai ont fuit le Japon après avoir été défait par les forces qui favorisaient l'influence européenne et se retrouvent en Amérique à lutter contre ces même européens qui veulent envahir l'ouest et détruire la culture amérindienne. On peut possiblement y voir une critique voilée de l'expension de l'influence américaine qui piétine injustement toutes les cultures par où elle passe, mais c'est par contre certainement un avertissement où Taniguchi nous rappelle que la destruction de la nature—illustrée ici par les bisons—a aussi des effets dévastateurs sur les cultures humaines.
Le style de Taniguchi s'est grandement amélioré depuis Blanco (1985) et Kaze no Sho (1992). La preuve en est ses superbes illustrations de début de chapitres. Il a maintenant une excellente maitrise du récit d'action, tout en conservant son style clair et précis. Sky Hawk est du pur Taniguchi à son meilleur. Malgré que ce soit un récit d'action, il nous entraine dans une marche à travers l'Ouest sauvage américain et suscite une sorte d'introspection sur la destruction du magnifique, mais fragile, équilibre de la nature (à laquelle l'homme appartient) et qui se fait souvent pour des raisons bassement égoïstes et politiques. A lire absolument.
Sky Hawk par Jirō TANIGUCHI. Casterman (Coll. Sakka), 2009. B&W, 15 x 21 cm, 288 pgs (dont 8 en couleur). 12.50 € / $26.95 Can. Recommandé pour adolescents (14+). ISBN: 978-2-203-02617-9.
Références: notice bibliographique et notice Wikipedia.
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