Thursday, March 04, 2010

Le Promeneur

“À la faveur des petits événements ordinaires de sa vie professionnelle et personnelle (la recherche d’un vélo disparu, une réunion de travail au sommet d’une tour de bureaux, etc.), un quadragénaire se laisse aller à des escapades impromptues au hasard de la géographie urbaine, sur les innombrables chemins de traverse qu’offre la grande ville — pour peu qu’on sache les voir et s’y abandonner… Une balade après l’autre, cette pulsion vagabonde prendra bientôt les allures d’un cheminement sentimental au fil des méandres de la mémoire, ponctuées d’images inopinément ressurgies de l’enfance et de la jeunesse du promeneur.” [Texte d'intro sur le site de l'éditeur]

Jirō Taniguchi admet volontier être influencé par la bande-dessinée Européenne. Cela se voit dans ses récits, qui appartiennent au mouvement de la Nouvelle Manga, ainsi que dans son style qui s'inspire beaucoup de la Ligne Claire. Le Promeneur exprime bien cette influence et c'est sans doute pourquoi Casterman a choisi de le publier sous la forme d'un album cartonné, comme on le fait pour la bande-dessinée. Ici, Taniguchi se trouve vraiment au confluent des deux styles: il illustre en noir & blanc, utilisant abondamment des trames (screentone) pour texturer et donner de la dimension à la case comme on le fait traditionnellement dans le manga, mais son trait reste simple et précis, formant des cases qui sont détaillées tout en restant claires et soignées, comme on le voit généralement en BD.

Le Promeneur [散歩もの / Sampo mono], fut d'abord sérialisé entre 2003 et 2005 dans Tsuhan Seikatsu, un magazine d'art de vivre publié par CatalogHouse, avant d'être compilé en 2006 par Freestyle Publishing. Cette autre collaboration avec le nouvelliste et chroniqueur télé Masayuki KUSUMI (Le Gourmet Solitaire) offre des déambulations nostalgiques qui s'apparentent énormément tant aux promenades culinaires du Gourmet Solitaire, qu'aux balades silencieuses de L'Homme qui marche. L'ouvrage se compose de huit courtes histoires de huit pages chacunes (huit est un chiffre chanceux et qui appel à la prospérité au Japon): L'Ampoule Edison, Les Socques de Shinagawa, Le Bouquiniste, La Fête des hippies, Les Concombres amers au milieu de la nuit, Le Chien et la balle, Le Quartier de l'Harmonica, et Les Gâteaux de Mejiro. Le tout se termine par un interview (dont on peut lire un extrait sur le site de Casterman). Taniguchi nous dit que “le modèle du promeneur, c'est moi-même.” Marcher lentement, naturellement et sans but offre une grande liberté et permet toutes sortes de découvertes. Comme le dit le promeneur, “l'idéal c'est de se perdre avec nonchalance” ou “La promenade (...) c'est le plaisir de marcher tranquillement, au gré de ses envies, sans objectif précis”.

Sans avoir la profondeur des oeuvres plus personnelles de Taniguchi, Le Promeneur est un manga agréable et qui se lit fort bien. C'est très léger, quoique beaucoup trop court, mais on y retrouve l'essentiel de ce qu'on aime chez Taniguchi: des histoires ravissantes et contemplatives.

Le Promeneur, par Masayuki KUSUMI & Jirō TANIGUCHI. Casterman, 2008. B&W, 22 x 30.4 cm, 88 pgs. 15,00 € / $31.95 Can. Recommandé pour adolescents (13+). ISBN: 978-2-203-01286-8.
Le Promeneur © 2006 by Masayuki Kusumi & Jiro Taniguchi. All rights reserved. © Casterman, 2008 pour l'adaptation française.

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