Sunday, July 21, 2013

L'âne d'or par Milo Manara

La version érotique d'un classique de la littérature latine, revu par l'un des maîtres de l'érotisme en bande dessinée.”

“Cet album propose le récit des péripéties du jeune Lucius, transformé en âne et soumis aux vicissitudes d'une vie d'errance. Brigands, sorcières et patriciennes aux mœurs légères se succèdent au fil de ce conte érotique sans tabous, tour à tour inquiétant et truculent. Inspiré de L'Ane d'Or d'Apulée, ce récit fait partie des œuvres marquantes de Milo Manara, au sommet de son art.” [ Texte du site de l'éditeur ]

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J'ai déjà mentionné cette adaptation de Milo Manara quand j'ai commenté Les Métamorphoses ou l'âne d'or d'Apulée et je m'étais promis d'y jeter un oeil. Et bien c'est fait.

Milo Manara est un artiste de renom et de grand talent, qui se consacre surtout à la bande-dessinée érotique. Il n'est donc pas surprenant qu'il ait choisi d'illustrer l'oeuvre d'Apulée dont le sujet se prête très bien à l'érotisme. Il n'en est d'ailleurs pas à sa première adaptation (il a auparavant réalisé le Décaméron de Boccace, les Voyages de Gulliver de Jonathan Swift, Vénus et Salomé de Pierre Louÿs, ou même le Kama-Sutra). L'âne d'or n'est pas exempt d'influences, car certains décors (grosses têtes de statues en arrière-plan) ne sont pas sans rappeler le Satyricon de Fellini, un cinéaste qui l'a d'ailleurs souvent inspiré et avec qui il a parfois collaboré. L'âne d'or a d'abord été publié aux Humanoïdes Associés en 1999. Il a connu une second édition en 2007 sous le titre “Le Métamorphose de Lucius,” puis a été réédité en 2011 sous le titre original.

L'album nous raconte les mésaventures de Lucius qui voyage en Thessalie pour affaires. Arrivé à Hypata, il loge chez l'avare Milon dont la femme Pamphile est réputée magicienne. Il se rend aux bains où il rencontre son ancienne nourrice, Byrrhène, qui l'invite à une fête le lendemain. Il retourne chez Milon pour le repas et, le soir venu, la servante Photis le rejoins dans sa couche pour un accouplement torride (la seule véritable scène de sexe de l'album, qui pour le reste offre surtout beaucoup de nudité). Le lendemain, Lucius se rends à la fête que Byrrhène donne à l'occasion des Lupercales (célébrant la fécondité, bacchus et le dieu des rires). Le banquet dégénère en orgie et Lucius revient complètement ivre. Croyant voir des brigands dans la nuit, il les attaque de son glaive. On l'arrête et le juge pour avoir tué d'innocents citoyens mais finalement tout cela n'est qu'une supercherie pour se moquer de lui. De retour chez Milon, Lucius retrouve Photis qui a reçu une belle fessée, car on croit qu'elle a trahit les secrets de sa maîtresse (ici la raison de la fessé diffère du récit original). Lucius, curieux, espionne la sorcière avec l'aide de Photis. Il la voit s'enduire d'un onguent et se transformer en oiseau de nuit. Il désire faire de même mais se voit plutôt transformé en âne!

Ainsi débutent véritablement les tribulations de Lucius. Photis le cache dans l'écurie et il lui suffira de manger quelques roses fraîches au matin pour faire disparaitre le sortilège. Toutefois, des brigands dévalisent la villa de Milon durant la nuit et l'âne (Lucius) est réquisitionné pour porter le butin. Il s'échappe du repère des brigands avec une de leur captives mais ils sont recapturé. Toutefois, ils sont libéré par l'époux de celle-ci qui s'était secrètement joint au groupe. On le confit aux soins d'un jeune garçon qui se révèle très cruel et torture Lucius. Il s'échappe à nouveau mais se retrouve vendu aux enchères à une secte de Cybèle. Puis devient une bête de somme chez un meunier. Puis est acheté par un couple de patriciens qui le traite fort bien, mais dont la maîtresse s'offre à lui et, ne pouvant refuser, il la prends avec son gros phallus d'âne! (Ici Manara montre tout de même un certaine pudeur: s'il n'hésite pas à montrer le membre viril de Lucius lorsqu'il est avec Photis, les scènes de bestialité, elles, sont savamment cachée par les bulles!) Ayant prouvé sa valeur, il se retrouve à jouer l'époux d'une condamné dans un spectacle du cirque. Mais réalisant qu'ils seront tous deux livrés aux fauves, il s'enfui à nouveau. Il court jusqu'à la mer où il implore la miséricorde de Cerès (Isis). Celle-ci lui apparait et promet sa rédemption. Au matin, il rencontre une procession et le prêtre porte une couronne de roses. Il en mange et redevient enfin un homme!

Le récit de Manara est assez fidèle à l'histoire d'Apulée, non pas tant par son exactitude que par son esprit. En effet, Manara choisit judicieusement les scènes qu'il illustre, ne sélectionnant que celles qui sont le plus propice à son sujet préféré: l'érotisme. Il omet le récit des contes intercalaires (l'histoire de Thelyphron ainsi que celle d'Eros et Psyché) et quelques une des tribulations de Lucius (ou en altère certains événements). Toutes ces omissions et changements rendent le récit un peu saccadé et anecdotique. En fait, l'histoire que Manara nous raconte est une sorte de condensé de lecture (Reader's digest) érotique!

Manara illustre son récit à l'encre (qu'il utilise aussi pour certaines textures et ombrages), qu'il colore ensuite à l'aquarelle avec une sélection limitée de couleurs qui s'approche presque de la bichromie. En effet, il n'utilise que des gris bleutés ou violet, des tons de brun ou de sépia et surtout la couleur chair, qui, en un merveilleux stratagème, se distingue particulièrement sur ce fond de couleurs délavées et discrètes. Les seules couleurs vives sont utilisées pour représenter un peu de sang (celui des flagellants de Cybèle) ou les dieux (rose et bleu pour Aurore, jaune pour Isis). Manara m'apparait au sommet de son talent et fait preuve d'une grande sensualité, non seulement dans la représentation de belles femmes, mais aussi dans l'illustration de la vie quotidienne à l'époque romaine.

Une très bonne bande-dessinée que je recommande tant pour son adaptation de ce classique de la littérature latine que pour son érotisme.

Extraits: pages 14 et 30; Attention: des scènes de nudité y sont représentées!
Un extrait comprenant les huit premières pages est aussi disponible sur le site de l'éditeur.

L'âne d'or, par Milo Manara. Paris, Les Humanoïdes Associés, janvier 2011. 24 x 32 x 1 cm, 56 pg., 18.99 € / $29.95 Can. ISBN: 978-2-7316-2318-5. Recommandé pour adultes (18+).

Cet album est également disponible en format digital (4.99 € aux Humanos, 5.99 € ou encore 2.49 € en location (10 jours) chez izneo.com).

Pour plus d'information vous pouvez consulter les sites suivants:

L'âne d'or © 2011 Les Humanoïdes Associés S.A.S., Paris.

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