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Sei Onii-san (聖☆おにいさん / Saint Young Men) est prépublié dans le magazine Morning 2 de Kodansha depuis 2007 et a, jusqu'à maintenant, été compilé en huit volumes (entre janvier 2008 et décembre 2012). C'est une comédie pour jeunes adultes (seinen) écrite et illustrée par Hikaru NAKAMURA, une jeune mangaka de vingt-neuf ans qui n'en est qu'à son second manga. Elle avait auparavant publié Arakawa Under the Bridge (荒川アンダー ザ ブリッジ), une comédie romantique prépublié depuis 2004 dans le magazine de Square Enix Young Gangan, compilée en treize volumes et qui a été adapté en une série animée. Saint Young Men a été traduit en français par Kurokawa (cinq volumes de disponibles depuis mars 2011, le plus récent étant paru en mars 2013). En 2009, ce manga s'est classé à la dixième position du palmarès japonais Oricon des meilleurs vendeurs et a également reçu le Prix Culturel Osamu Tezuka pour une histoire courte. Le manga a également été adapté en un long métrage d'animation (une production du studio A-1 Pictures, avec un scénario de Rika NEZU et une réalisation de Noriko TAKAO) qui est sortie dans les salles de cinéma japonaise en mai 2013.
[ Page 54 -- C'est en format japonais: Lire les bulles de droite à gauche ! ]
J'ai récemment découvert ce manga et, comme ça m'avait l'air tellement hilarant, je n'ai pas pu résister à l'emprunter à la bibliothèque pour y jeter un coup d'oeil! C'est effectivement très drôle. Siddhārtha Gautama, dit “L’Éveillé”, et Jésus de Nazareth, le “fils de Dieu”, décident de prendre un repos bien mérité et louent un petit appartement dans le quartier de Tachikawa à Tokyo. Bien sûr, après avoir vécu au Paradis, la vie dans la société moderne Japonaise nécessite une certaine adaptation.
Une bonne partie de l'humour léger que l'on retrouve dans le manga provient de ce contexte très propice à la comédie de situation (sit-com). Cette interaction, pour ne pas dire confrontation, entre le divin et le quotidien trivial est aussi une occasion de ridiculiser certaines moeurs et habitudes de notre mode de vie moderne. De même, d'une façon un peu plus sérieuse, le manga offre une sorte de critique sociale, en utilisant le regard extérieur de nos deux vacanciers (qui, pour cet aspect du récit, auraient pu être n'importe quels jeunes touristes américains ou européens). On peut aussi dire que, par la bande, il permet aux lecteurs occidentaux de découvrir plusieurs aspects de la société nippone.
Ainsi l'auteur joue avec les apparences (Jésus est comparé à Johnny Depp, Bouddha se plaint de sa coiffure qui ressemble à une permanente ou des statues qui le représentent obèse) ou avec leur attributs divins (les stigmates de Jésus saignent et il change l'eau en vin et autres miracles, Bouddha se sort de situations difficiles en utilisant son “Buddha smile” et brille d'une aura de sainteté lorsqu'excité). Chacun se trouve des aspirations: Bouddha, ayant découvert Tezuka, est inspiré et se met à produire un manga plein d'inside joke célestes et Jésus, pour réaliser un vieux rêve, convint Bouddha de former un duo de standing comics!
La représentation de Jésus me semble toutefois plus caricaturale que celle du Bouddha, probablement parce que l'auteur à une meilleurs connaissance de ce dernier. D'ailleurs j'ai aussi l'impression qu'une partie de l'humour généré par Bouddha se perd soit dans la traduction ou dans l'ignorance des traditions bouddhistes inévitable chez la plupart des lecteurs occidentaux.
Si l'humour des Vacances de Jésus et Bouddha est léger et tout à fait anodin, il est toutefois risqué de jouer avec des icônes religieuses. Nos deux anti-héros se voient la proie de nombreuses tentations de la vie moderne (commercialisme, jeunes collégiennes, etc.) et les mettre face à ces dilemmes et indignités irrévérencieuses pourrait en choquer plus d'un chez les extrémistes religieux. L'auteur aurait aussi pu créer un trio de personnages en y ajoutant le Prophète musulman, mais cela aurait représenté un risque trop grand car l'on sait que les fondamentalistes (quels qu'ils soient) ne badinent pas avec l'humour. Si le manga n'a pas généré de tollé, il a tout même essuyer quelques critiques mais, étrangement, jusqu'à maintenant surtout de la part d'organisations bouddhistes conservatrices. L'absence de traduction anglaise explique sans doute pourquoi la droite chrétienne n'a pas encore crié au scandale... Mais au Japon peu de gens se soucient de la religion, les pratiques religieuses étant plus considérées comme des coutumes que l'expression d'une ferveur croyante. On y mélange sans peine shintô et bouddhisme en un syncrétisme insouciant, où les esprits sont toujours présents dans la vie de tout les jours. Pourquoi n'en irait-il pas de même pour le “fils de Dieu”?
Si l'artiste porte beaucoup d'attention aux détails (comme les textes sur les t-shirts des personnages par exemple), son style reste encore un peu brouillon. Mais c'est un trait qui est commun à la plupart des manga d'humour léger. Toutefois, mon reproche principal (et cela vaut pour beaucoup de manga publié ces derniers temps), est l'utilisation d'une typographie minuscule dans les textes exprimant les pensées des personnages, ainsi que pour les notes explicatives. Les éditeurs devraient réaliser qu'il n'y a pas que les jeunes qui lisent les manga, mais aussi des vieux aux yeux fatigués!
Quoiqu'il en soit, j'ai beaucoup rigolé en lisant ce premier tome des Vacances de Jésus et Bouddha et j'ai bien l'intention de lire les volumes suivants. Je vous le recommande donc.
[ Pages 24, à droite, et 55, à gauche ]
Les vacances de Jésus et Bouddha, vol. 1, par Hikaru Nakamura (traduction: Étienne Robert). Paris, Kurokawa, mars 2011. 12,8 x 18,2 x 1,2 cm, 144 pg., 6,70 € / $11.95 Can. ISBN: 978-2-351-42587-9. Lecture dans le sens japonais (de droite à gauche) et recommandé pour jeunes adultes (14+).
Pour plus d'information vous pouvez consulter les sites suivants:
Saint Oniisan © 2008 Hikaru Nakamura, All Rights Reserved.
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