“Au milieu du XIXe siècle, la révolution industrielle se met en marche en Europe, chamboulant notre manière de voir, de consommer et de vivre. La production en masse est désormais possible, mais les inégalités qui résultent des nouvelles pratiques économiques et sociales creusent un fossé qu'il est difficile de combler. La nouvelle donne profite à une minorité d'entrepreneurs tandis qu'elle dessert considérablement la masse de travailleurs qui ne deviennent qu'une «force de travail» pour enrichir les premiers. Découvrez dans ce manga une introduction à l'oeuvre majeure de Karl Marx, concernant le système économique actuel: le capitalisme...”
[ Texte de la couverture arrière ]
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Les deux volumes du Capital (まんがで読破 資本論 & まんがで読破 続・資本論 / Manga de dokuha: Shihon-ron & Manga de dokuha: Zoku Shihon-ron / Lit. Le Capital & Le Capital, la suite) sont les vingt-sixième et trente-cinquième volumes de la collection manga de dokuha (lit. “Lisez en manga”) publiés par East Press en décembre 2008 et avril 2009 (les #797 & 885 du catalogue de l'éditeur). L'adaptation et le dessin ont été réalisé par le studio Variety Art Works, dont on connait très peu de chose. C'est le tout premier titre de la collection a être traduit par Soleil Manga en janvier 2011 dans sa collection “Classiques”. J'ai déjà introduit cette collection et commenté quelques uns de ses titres (L'Ancien et le Nouveau Testament de la Bible, À la recherche du temps perdu). Cette collection reprend en traduction quelques titres de l'impressionnante collection japonaise Manga de Dokuha publiée par East Press, qui se consacre à adapter en manga des classiques de la littérature pour les rendre accessible à un plus large publique.
Je dois avouer que c'est tout un défit que de vouloir adapter pour les masses un ouvrage théorique tel que Le Capital. Si Marx est parfois cité, il était toutefois impossible d'utiliser son texte tel quel, alors les auteurs ont inventé une histoire afin d'en illustrer les principes de base. Le récit nous fait donc suivre Robin, un jeune producteur de fromage artisanal dont la production est insuffisante pour répondre à la demande du marché. Il rencontre par hasard Daniel, un jeune investisseur très ambitieux, qui lui propose d'investir afin d'industrialiser sa production. Ayant souffert de la pauvreté étant plus jeune (sa mère en est morte), il est déterminé à devenir riche et accepte la proposition de Daniel. Avec lui, il découvre les rouages du capitalisme. En mécanisant et simplifiant la chaine production il n'a pas besoin d'une main d'oeuvre qualifiée et celle-ci devient donc bon marché et remplaçable. Ainsi les ouvriers “vendent” leur force de travail comme une marchandise. Malheureusement, afin de faire face à la demande, aux pressions de la concurrence et, surtout, de réaliser du profit, la cadence et le nombre d'heures de travail doivent être augmenté au point d'avoir des effets abrutissants et néfastes sur la vie des ouvriers. Devant cette exploitation abusive de ses ouvriers, Robin a des doutes mais il n'a pas le choix s'il ne veut pas tout perdre et redevenir pauvre. [ci-contre: vol. 1, pg 106]
“Connais-tu les mécanismes du capitalisme ?”
“Avec la révolution industrielle, notre mode de vie a considérablement changé. Aujourd'hui, nous croulons sous les objets, nous travaillons comme des forcenés, nous consommons toujours plus. Et bien que nous sachions par avance que ce système capitaliste est voué à l'échec et aboutira sur une crise, qui fera d'innombrables victimes, nous continuons de fermer les yeux.”
“Comment naissent les crises économiques ? Comment le chômage est-il possible ? Pourquoi toutes ces inégalités sociales ? Découvrez, par le biais de ce manga, les idées de Marx sur la question...”
[ Texte de la couverture arrière ]
Lorsqu'il est décédé en 1883, Marx n'avait complété que la première partie de Das Kapital. C'est son collègue Friedrich Engels qui le finira en utilisant ses notes. Ainsi, après avoir expliqué à travers l'histoire de Robin les concepts de base du capitalisme (marchandise, exploitation, force de travail, valeur du travail), les auteurs du manga prennent une nouvelle approche beaucoup plus efficace: ils font intervenir Engels lui-même comme narrateur et guide. Grâce à l'utilisation de petits graphiques et d'exemples puisés dans l'histoire de Robin, celui-ci nous explique des concepts comme la valeur d'échange, la plus-value ou la circulation du capital. Il nous apprend aussi que la recherche du profit et la surproduction qui en découle crée une spirale infernale qui entraine inéluctablement les entreprises, ainsi que tout les fournisseurs et distributeurs qui lui sont liés, vers la crise. [ci-contre: vol. 2, pg 7]
En effet, malgré que le profit des entreprises proviennent essentiellement de la plus-value générée par la travail des ouvriers, la croissance demande de mécaniser la production, diminuant ainsi la main-d'oeuvre, causant du chômage, et ultimement diminuant les profits. C'est là l'une des contradictions du capitalisme. De plus, la surproduction conduisant à la suraccumulation des marchandises, la baisse des profits conduisant à un ralentissement de la circulation du capital puis à une monté des créances douteuses, le système bancaire commence à ployer sous la pression. Les banques finissent par manquer de liquidité et c'est la crise financière. Ce genre de crises est inhérent aux sociétés capitalistes et se produit régulièrement. Elles sont cependant nécessaire pour “rétablir l'équilibre entre l'offre et la véritable demande. Mais après quels dégâts ?” Le manga se conclut avec l'image (sarcastique j'espère) de Marx et Engels, auréolés, entamant leur ascension vers les cieux avec un dernier message: “remettez en cause le capitalisme”!
Certaines histoires ne sont que légèrement adaptées pour s'ajuster à un médium narratif plus graphique et d'autres sont adaptées plus lourdement. C'est le cas ici avec Das Kapital qui est une oeuvre théorique plutôt rébarbative. Chose surprenante, l'idée de créer une histoire afin de faire passer le message théorique d'une façon plus facile fonctionne assez bien pour ce manga. Il faut dire que c'est un sujet assez intéressant car très d'actualité: on se sent tous touché par la crise et avons sans doute tous eut le sentiment d'être exploité par notre employeur (diminution du personnel, augmentation des cadences -- mais n'oublions quand même pas que nous ne sommes pas à la fin du XIXe siècle et que nos emplois viennent avec un salaire minimum et de nombreux avantages sociaux!). Il s'agit tout de même d'un manga un peu lourd et pas vraiment amusant à lire. La lecture en est même laborieuse, pour ne pas dire assommante -- ce qui n'est nullement aidée par le fait que le dessin est relativement médiocre. Le second volume est un peu plus aisé à lire sans doute à cause de l'utilisation de techniques narrative plus didactiques.
Je n'ai pas lu l'original alors je ne peux pas vraiment comparer mais je suis pas mal sûr que cette version manga est plus accessible. Elle pourra sans aucun doute assouvir votre curiosité à l'égard de Marx et vous en offrir une bonne introduction. Cela me rappel des manga didactiques comme Japan Inc (en français: Les Secrets de l'économie japonaise en bande dessinée) ou Manga Science. Toutefois, malgré l'intérêt du sujet, ce manga demeure assez moyen, une simple curiosité qui, hélas, fait plutôt piètre figure quand on vient de lire un manga comme Cesare.
Le Capital, Vol. 1 et Vol. 2, écrit par Karl Marx (avec Friedrich Engels pour le vol. 2) et illustré par Variety Art Works (traduction: Florent Gorges; adaptation: Demopolis). Toulon, Soleil Manga (Coll. Classiques), janvier 2011. 12,8 x 18,2 x 1,5 cm, 192 pg. ch., 6,95 € / $12.95 Can. ch. ISBN: 978-2-30201-322-3 / 978-2-30201-396-4. Lecture dans le sens occidental (de gauche à droite) et recommandé pour jeunes adultes (14+).
Pour plus d'information vous pouvez consulter les sites suivants:
Manga de dokuha: Das Kapital by Karl Heinrich Marx © Variety Art Works • East Press Co., Ltd. All rights reserved. Édition française © 2011 MC Productions.
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1 comment:
Intéressant quand même comme idée. Si on a pas le goût de se taper le Capital, on pourra au moins comprendre les bases des idées de Marx et Engels.
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